Bilan culturel 2024
Publié le 31 décembre 2024 dans les catégoriesblogbilan
46 films sur 45
50 jeux sur 40
23 livres sur 20
61 bandes dessinées sur 24
14 albums sur 24
Films
From Beijing with Love (Stephen Chow, 1994): découvert par hasard au détour de reddit, un gif d’une scène absurde et drôle. Ce fut le film de réveillon avec les ami·e·s.
Tenet (Christopher Nolan, 2020): je ne doute pas que le concept est génial, que la réalisation a dû demander des montagnes d’ingéniosité pour exécuter certaines scènes, veiller à ce que tout soit cohérent, inscrutable, ou suffisamment scrutable pour qui adore se plonger dans les nolâneries, alors est-ce qu’elle tourne ou pas cette toupie, et voici les quinze détails que vous n’avez pas aperçus dans Tenet. En même temps il faut dire que passé l’heure d’exposition habituelle, tout va à mille à l’heure, et le train ne s’arrête pas. On a payé pour ce ticket de foire, après tout, il faut que ça aille vite. Et avec un budget à 9 chiffres, il y a intérêt à ce que le train aille vite, et loin. Je ne peux m’empêcher de trouver l’exercice un peu vain. Les idées sont diluées dans une ambiance James Bond, qui reprend à la lettre tous les codes, jusqu’aux voyages autour du globe, parce que les budgets explosent et le pétrole n’est toujours pas assez cher pour arrêter ça. De quoi Nolan m’a-t-il parlé pendant deux heures ? Pas grand-chose, de lui, de ses fantasmes d’artificier, de l’odeur de l’argent, de scripts qui cherchent timidement à s’échapper des circonvolutions. Tenet est un film qui aurait dû être filmé par les gens qui ont fait Primer, et écrit par Mark Z. Danielewski, et là on aurait eu quelque chose de fantastique. À l’endroit comme à l’envers, Tenet méritait mieux que les gros sabots de Nolan et Hollywood.
Le Chant du Loup (Antonin Baudry, 2019): l’importance donnée au son, qu’on entend, qu’on voit à peine sur les écrans, dans les yeux des officiers, des sons qui tuent, des ondes qui font paniquer, des échos qui résonnent dans un langage qu’on ne prend pas la peine d’expliciter. C’est moins une histoire de géopolitique qu’une histoire de sensations, d’urgence, de confiance dans les protocoles, dans les autres, dans les mots qui sont prononcés, dans la structure. Mais qu’est-ce que la structure, sinon un aveuglement consenti, à l’image de ce sous-marin qui se prive de ses yeux pour mieux écouter ?
The Creator (Gareth Edwards, 2023)
Anatomie d’une Chute (Justine Triet, 2023)
Bullet Train (David Leitch, 2022): un mélange de Guy Ritchie et d’Edgar Wright, la même énergie, le même humour, le même amour pour des personnages et des dialogues rocambolesques, le tout à deux cents à l’heure.
Transformers : Rise of the Beasts (Steven Caple Jr, 2023): vu dans l’avion au retour de Bangkok, je voulais voir où en était la franchise. Je la laisse donc là où elle est, en quinze ans ça n’a pas changé d’un iota.
Kong : Skull Islands (Jordan Vogt-Roberts, 2017): passé la moitié du film, je me suis aperçu que je l’avais déjà vu, déduisez-en ce que vous voulez sur la qualité.
Now I Know Where to Find You (Diego Berakha Otal, 2022)
John Wick : Chapter 4 (Chad Stahelski, 2023): ouais c’était pas bon chef, ça suivait la théorie de la james bondisation d’une franchise, qui dit que plus tu fais de films dedans et plus la probabilité que ça tourne en james bond clone tend vers 1. Japon, Allemagne, New York, Paris eh ben les loulous, John AirFrance. Tout le monde a une armure, tout le monde est buff as fuck et la seule différence enre Jean Jean et les nonames c’est que lui il a une extra plot armor que les autres n’ont pas. Mais je n’ai plus reconnu l’assassin méthodique et qui semblait avoir un coup d’avance sur tout le monde et qui avait une place unique dans un monde très petit et secretive où on essaie de garder ça quand même un minimum confidentiel si possible. Des personnages non-joueurs par milliers partout, c’était usant.
Dune : Part Two (Denis Villeneuve, 2024): mon commentaire sur le premier film s’applique toujours autant.
Seven Souls in the Skull Castle : Season Bird (Hidenori Inoue, 2017)
Retour à Séoul (Davy Chou, 2022)
Aquarius (Kleber Mendonça Filho, 2016)
Sri Lanka’s Killing Fields (Callum Macrae, 2011)
Evil Does Not Exist (Ryusuke Hamaguchi, 2024)
Battle Angel Alita (Robert Rodriguez, 2019)
Mad Max (George Miller, 1979): rétrospective de la franchise Mad Max, que je ne connaissais pas, dans la perspective de voir Fury Road et Furiosa après.
Mad Max 2 (George Miller, 1981)
Mad Max 3 : Beyond Thunderdome (George Miller, George Ogilvie, 1985)
Le Nom que tu portes (Hervé Demers, 2016)
Une fois la poussière retombée (Hervé Demers, 2020)
Les adieux de la Grise (Hervé Demers, 2013)
Mad Max : Fury Road (George Miller, 2015): quelle claque, quel spectacle. Un film de magiciens, de saltimbanques, de cracheurs de feu, d’acrobates et de jongleurs. Le cinéma qui se rappelle que l’idée est d’abord avant tout de projeter des images très rapides sur un écran très grand, pour ouvrir les yeux très fort.
Furiosa : A Mad Max Saga (George Miller, 2024)
The Teapot Maker (Duncan Parker, 2024)
Daybreakers (The Spierig Brothers, 2009): un film de vampires avec William Dafoe et Ethan Hawkes, emprunté par hasard à la bibliothèque. Dans l’ensemble ça se laisse regarder, et il y a même quelques idées dans la photographie. Le making-of qui est aussi long que le film régale par contre.
The Northman (Robert Eggers, 2022): je lis partout des avis satisfaits de personnes qui y voient un magnifique piez-de-nez aux vilains mascus et fachos qui n’ont pas compris que le film se moquait d’eux, et que ce n’est pas leur film, c’est le nôtre, nous autres déconstruits. Je ne comprends pas cette lecture, avons-nous vu le même film ? Avons-nous vu cette fin où le personnage finit par mourir comme un homme, un vrai, après avoir eu son foutu combat singulier contre son ennemi, en laissant femme et enfants se débrouiller sans lui, parce qu’il a été incapable de passer outre son ego et ses peurs de vengeance ? Où est la dénonciation là-dedans ? Parce qu’il y a un deuxième acte qui ressemble à la vie pastorale après l’éllipse temporelle de Vinland Saga, ça fait de lui un homme repenti ? Parce que sa mère admet que son père était un homme violent, idiot et cruel, ça fait de sa quête quelque chose de vain et de faux ? Peu importe, il ne croit pas sa mère, il ne croit qu’en sa version de la chose, et jamais le film ne vient bousculer le personnage et sa vision, jusqu’à ce combat final, de la pure esthétisation du 1v1 phallique. Donc non, pour moi ça ne dénonce rien, ça ne tourne rien en dérision, ça fait semblant de le faire mais ça n’est pas Vinland Saga, loin de là. Plus je regarde des films de Eggers, et plus je me dis que The Lighthouse était une anomalie, et que le type ne recapturera plus jamais la foudre dans la bouteille comme ça. Je crains un peu son Nosferatu.
City of Darkness (Soi Cheang, 2024)
Hit Man (Richard Linklater, 2023): franchement, je ne m’attendais à rien, et j’ai été agréablement surpris. C’est un vaudeville sans grivoiserie, qui tient uniquement par son script et par ses personnages, sans excès ni clins d’oeil appuyés vers le public qui est dans le coup.
The Matrix (The Wachowskis, 1999): ça tient toujours autant la route aujourd’hui.
The Matrix Reloaded (The Wachowskis, 2003)
The Matrix Revolutions (The Wachowskis, 2003)
The Matrix Resurrections (Lana Wachowski, 2021): c’est un cashgrab facile qui était honnête au début sur le fait d’être un cashgrab facile, mais qui a pas pu s’empêcher ensuite d’essayer de faire croire que ça ne l’était pas.
The Eternal Daughter (Joanna Hogg, 2023): un ennui absolu, l’impression d’être revenu sur les bancs de l’université pour étudier le mouvement gothique en littérature.
Megalopolis (Francis Ford Coppola, 2024): tellement de moyens, tellement de sous dépensés là-dedans, et pas une seule personne qui a quoi que ce soit d’intéressant à faire dire à ses personnages. L’écriture est catastrophique, le regard nombriliste, et la vision politique inexistante, mais que peut-on attendre d’un vieil homme américain de 85 ans qui essaie de nous parler du futur ? L’exercice est voué à l’échec dès le départ. Il reste le faste, la photographie, la décadence, l’indécence de nous dire de confier les clés de la ville à des technobarons népotistes. En même temps il s’y connaît en terme de népotisme et de reproduction sociale, ce vieux Francis.
Joker (Todd Phillips, 2019)
A l’épreuve (Akim Isker, 2024): un téléfilm qui donne du temps d’écran aux éboueurs et éboueuses. C’est un peu trop mélodramatique et sirupeux vers la fin, mais quitte à voir ça, j’ai apprécié voir autre chose qu’une famille bourgeoise le temps d’une heure trente.
Joker : Folie à deux (Todd Philips, 2024): j’ai oublié la moitié de ce que je pensais dessus, et que j’ai dit à Oriane à l’époque, pendant qu’on remontait le long de la ligne de tram pour rentrer. Je me rappelle de ceci cependant: Harley qui s’intéresse à l’idée du Joker sans voir Arthur derrière, et qui l’abandonne aussitôt que l’idéal disparaît, qui entre et sort des institutions psychiatriques et carcérales comme ça, limite pour s’amuser, en tout cas certainement pas sous contrainte d’un état coercitif ou par besoin urgent, désespoir, détresse ou danger immédiat, c’est la meilleure représentation de cette population qui voit Joker, le film, le personnage, comme des phénomènes, des sujets d’analyse, des porte-drapeaux, des slogans, mais surtout pas plus que ça. C’est comme cette phrase de Laurène Marx sur L’Amour Ouf où elle dit “tout est esthétisé en mode quand les ouvriers sortent de l’usine ou font la grève on dirait High School Musical en salopette histoire de nous rappeler que pour les bourges une usine c’est un endroit où on écoute de la techno.”
The Fourth Kind (Olatunde Osunsanmi, 2009): un film d’horreur qui est passé assez inaperçu à sa sortie, et qui vaut le coup d’oeil. Je l’ai revu avec Oriane, qui ne connaissait pas, suite à une séquence dans Immortality qui utilise un effet qu’on retrouve dans The Fourth Kind. Je trouve que le film arrive à créer une tension et une angoisse qui va crescendo tout le long, grâce à des scènes saisissantes.
Miséricorde (Alain Guiraudie, 2024): je ne connaissais pas le réalisateur, et je m’en vais de ce pas découvrir sa filmographie en 2025. C’était délicieux, merci.
Flow (Gints Zilbalodis, 2024)
Vingt Dieux (Louise Courvoisier, 2024): un premier film touchant, dans la campagne jurassienne. Les accents chantent, le lait se vole la nuit, les perspectives sont peu nombreuses mais l’espoir subsiste.
Juré n°2 (Clint Eastwood, 2024): un film qui sent la naphtaline.
Conclave (Edward Berger, 2024): Il faut passer outre les quelques phrases portant des messages assassins, qui font des appels de phare de la même manière que le nouvel Hollywood commente sur lui-même dans une fausse introspection en commodifiant ses propres mea culpa pour continuer de les vendre; c’est juste du business. Il faut passer outre, donc, et plutôt regarder la révérence qu’a la photographie, le cadrage, le respect dans les costumes, dans les protocoles, pour montrer tout le sérieux et toute la gravité, et surtout le constat que l’institution, on l’aime ou on la réforme, et ce film l’aime beaucoup et veut beaucoup la réformer, mais surtout on ne la quitte pas, oh non, absolument pas. Et ça va jusqu’à cette fin où le futur pape renonce à une procédure médicale parce que finalement elle n’est pas nécessaire, parce que Dieu l’a fait comme ça et que c’est très bien, pas besoin de modifier l’oeuvre de Dieu. Sous le vernis de la coupole, une peinture plus figée qu’elle en a l’air.
Jeu vidéo
Ensemble Stars !! Music (Cacalia Studio, Happy Elements K.K., 2015): l’aspect rythme était intéressant, mais l’enrobage imitant l’industrie kpop sans aucun recul critique dessus a fini par me lasser.
Pizza Tower (Tour de Pizza, 2023): fiévreux, survolté, et en même temps zen et méthodique. La moitié du jeu environ aurait été mis à la poubelle ou lissé si il avait été une production avec plus de budget et de project owners, et ça fait plaisir de voir que ce n’est pas le cas.
20 Small Mazes (FLEB, 2024)
The Binding of Isaac : Afterbirth+ (Edmund McMillen, Nicalis, 2017)
Subnautica (Unknown Worlds Entertainment, 2014): le jeu aurait été encore meilleur avec un peu moins de farming à faire, mais il est tout de même excellent. L’exploration se fait presque sans artifice autre que l’envie d’en voir plus, plus bas, plus loin, pour le plaisir des sens. Il y a de vrais moments de tension lorsqu’on descend pour la première fois sous la barre des 200, 500, 1000 mètres, ou lorsqu’on rencontre pour la première fois des créatures inquiétantes. Et en toile de fond, une histoire en pointillés, racontée avec l’environnement, les débris, qui est aussi complète ou aussi floue que notre propre curiosité vis-à-vis d’elle et du monde.
Magicube (nebu soku, 2024): rarement vu des puzzles aussi ciselés. L’espace créé pour les besoins de la réflexion semble minime, et inversement proportionnel au temps qu’il faut pour résoudre l’affaire, soit tout le contraire du bruyant et verbeux Talos Principle.
Batman : Arkham Knight (Rocksteady Studio, Warner Bros, 2015): passé le quart d’heure d’admiration des textures et des effets de lumière, c’est à peu près tout ce que je n’apprécie pas dans le jeu vidéo. À un moment Batman a besoin de sa Batmobile pour rattraper des Batméchants partis dans une voiture qui n’est pas la Batmobile, et du coup la scène se fige sur le sol, et refuse d’aller plus loin à moins d’appuyer sur A, après quoi Batman dira avec sa Batvoix caverneuse qu’il va ”even the odds” en appelant son véhicule, un véhicule qui a coûté à peu près autant que les économies effectuées en Pays de la Loire sur les secteurs de la culture, des associations, du sport et du planning familial. Even the odds. Va te faire foutre, Batman.
Save the Date (Chris Cornell, 2013): Un jeu qui m’a rappelé un petit peu No One Has To Die sur la forme de la boucle temporelle. On l’a lancé pour voir ce que c’était avant la vidéo d’Ian Bryce Jones qui le décortiquait, lui et d’autres jeux.
Escape Academy (Con Crew Games, 2022)
Call of the Sea (Out of the Blue, Raw Fury, 2020)
Venetica (Deck13, DTP Entertainment, 2009): c’est difficile de recommander le jeu dans son ensemble, il se perd parmi le reste des jeux PC des années 2005-2010 avec son bloom excessif, son système de combat archaïque, ses dialogues taillés à la serpe, son histoire famélique et ses systèmes de jeu fonctionnels, mais peu originaux. Pour autant, Venise, la grande cité qui occupe les deux-tiers du jeu passé l’introduction poussive, vaut le coup d’oeil. Toute verticale, la modélisation de la ville détonne avec ses quartiers imbriqués, ses curiosités architecturales, sa société stratifiée et organisée autour de zones toutes plus curieuses les unes que les autres.
GoNNER (Art in Heart, Raw Fury, 2016): un bonbon acidulé. Ne pas en abuser.
Grime (Clover Bite, Akupara Games, 2021): encore un univers mort-né, encore une histoire sybilline, encore des personnages qui ne parlent que par allusions et métaphores, tout ceci est lassant. Mais il y a ces combats de boss qui demandent d’apprendre la danse, de tourner autour et respecter la créature en face de nous; ces sensations dans les différentes armes, pour s’exprimer selon ses préférences; ces mouvements qui finissent par devenir fluides, à la façon d’une pierre qu’on taille et qui devient glaise.
Hellblade : Senua’s Sacrifice (Ninja Theory, 2017): refait en préparation pour le 2. Toujours aussi bien, jamais autant émouvant qu’aujourd’hui.
Void Stranger (System Erasure, 2023)
Tales of Berseria (Bandai Namco, 2016): Au bout de quelques heures en coop avec Oriane, nous avons lâché l’affaire. On était toujours à recevoir des écrans de tutoriels après huit heures de jeu. On était dans la deuxième grosse ville du jeu qui était copiée collée de la première. On nous demande de ramasser 140 larmes de chat partout pour ouvrir un coffre pour libérer un chat dedans qui nous donne absolument rien. On est censé échanger tous les 18 combats d’équipement une fois qu’on les a maîtrisés, pour que ça nous rajoute 4% de dégâts supplémentaires contre les crustacées (je n’invente rien dans ce bonus), pour mettre un autre équipement qui nous donnera un boost de 3% de charge des artes. L’équipe c’est 50 nuances d’émo et de edgy. Ça va merci, on va passer notre tour. Il y a une mécanique, je ne vous mens pas, qui consiste à envoyer un bateau faire le tour du monde pour te ramasser des babioles, et ça reste en tâche de fond d’une demi-heure après quoi t’es censée revenir à un port (car pas accessible ailleurs) pour récupérer les ressources et relancer le bâteau toutes les demi-heures, tout ça pour des ressources dont tu as rien à foutre parce que c’est les mêmes que tu ramasses au bord de la route par centaines. T’es censée utiliser ces ressources pour recycler et améliorer ton équipement, mais vu que tu en chopes 8 de la même famille par donjon, et que tu dois tous les maîtriser pour choper les bonus passifs avant d’échanger à nouveau, t’as zéro incitation d’acheter, améliorer ou recycler quoi que ce soit, il te reste juste à les vendre quand tu les as tous maitrisé, et avec cet argent tu euh—t’achètes des malabar sans doute, tu vas certainement pas acheter de l’équipement obsolète au bout de 18 combats ? donc t’as des pans entiers de sous-systèmes comme ça qui servent à absolument rien, c’est un désastre de game-design, c’est boursouflé comme pas possible, et l’histoire c’est une énième histoire de revanche, sauf que cette fois-ci les revanchards sont des misfits au lieu de colette la bouche en coeur, c’est très innovant.
Soulstice (Reply Game Studios, 2022): abandonné au bout du deuxième chapitre. Les caméras fixes permettent de faire des compositions travaillées avec un jeu d’échelle dans l’architecture, des prises de vue élaborées, des angles peu communs, mais ça ne sauve pas du gameplay redondant.
Senua’s Saga : Hellblade 2 (Ninja Theory, Microsoft, 2024): à son annonce et avec les premiers trailers qui sont sortis j’ai cru que ça allait devenir autre chose que le 1, mais pas autre chose en bien, autre chose en plus, plus de budget, plus de spectacle, plus de pression d’exécutifs après le rachat du studio par Microsoft, et bon Microsoft on connaît, ils font rarement dans la dentelle. Et finalement j’ai quand même fait le jeu, parce que le 1 était exceptionnel pour moi, je suis en train d’écrire dessus d’ailleurs, avec aussi quelque chose de prévu pour le 2. Et c’était bel et bien autre chose, c’était bel et bien plus de budget, plus de spectacle, mais aussi autre chose, et quelque chose qui complète absolument le 1, à mes yeux, qui vient rajouter de la complexité dans le personnage de Senua, en l’ouvrant, en la mettant à la fois au milieu et en la décalant vis-à-vis d’elle-même et de ce qu’elle signifie, pour ce monde, pour cette histoire, pour les autres. C’était coup sur coup un tour de force.
A Little to the Left (Max Inferno, Secret Mode, 2022)
Venba (Visai Games, 2023): il y a des oignons dans le jeu parce que c’est un jeu de cuisine, et c’est sans doute pour ça qu’on pleure aussi un peu en le faisant. Ça, ou le fait que c’est une oeuvre sensible, à l’écriture plus fine qu’il n’y paraît, et qui m’a particulièrement touché, moi qui n’ai pas spécialement de liens avec la moitié de mon héritage familial, et qui pourrait ou aurait pu être dans la position du personnage principal.
Planet of Lana (Wishfully Studios, Thunderful Publishing, 2023): Le jeu s’inscrit pleinement dans le genre du platformer cinématique, au point où les canons du genre l’alourdissent et l’empêchent de proposer autre chose que du déjà vu, dans l’éternel voyage de la nature vers l’industriel, dans les sempiternels puzzles pénibles, dans la lourdeur du personnage, dans l’absconsité apparemment recherchée de la narration, que tout le monde semble demander dans ce genre de jeu. Restent quelques vistas qui arrivent bien trop tard, une timide relation entre la créature et nous qui ne sera finalement jamais vraiment approfondie au-delà de l’utilitarisme mécanique nécessaire pour les puzzles, et un désir de voir un jour un jeu de ce genre le dépasser pour accepter pleinement le spectacle sans s’accrocher à trouver une légitimité de high art.
Hauntii (Moonloop Games, 2024): Mario Odyssey avec une direction artistique plus radicale, et disons-le franchement, bien plus jolie.
Xenosphere (Nifflas, 2024): un petit jeu passé inaperçu, mais si inventif, si amusant, si rafraîchissant.
Genesis Noir (Feral Cat Den, Fellow Traveller, 2021): très déçu par la proposition.
Dordogne (Un Je ne Sais Quoi, Umanimation, Focus Entertainment, 2023): c’est finalement un peu toujours la même histoire. C’est cette réponse qui revient inlassablement, quand on demande quelles étaient les références en jeu vidéo durant la production de Dordogne, et que la réponse est toujours la même, c’est ”on n’en avait pas”. Non à la place on se tourne vers le cinéma, vers Miyazaki, vers Terrence Malick, vers la peinture, vers la BD, mais jamais le jeu vidéo. C’est pour ça qu’on se retrouve avec un jeu qui demande de faire 5 mouvements/clics pour ouvrir une serrure de porte, avec une boucle de gameplay qui fait le tour de la proposition en dix minutes montre en main, mais qui n’empêchera pas au jeu de l’étirer pour huit heures, huit longues heures où on refait toujours la même chose, et on la refait lentement, le plus lentement possible, sans aucune friction, sans aucune agentivité dans le geste, sans rien, juste une mécanique pénible de créatifs qui ne jouent pas au jeu vidéo mais qui voulaient quand même faire un jeu vidéo, au lieu d’en faire, je ne sais pas moi, une BD, un film d’animation, soit ce qu’ils faisaient avant, et continuent de faire. Et puis il y a cette Dordogne fantasmée, cette carte postale, cette écriture qu’on finit par reconnaître, parce que c’est un peu toujours les mêmes ficelles, les mêmes codes, ceux qui sont encensés aux Pégases, ces jeux “à propos de”, dans cet entre-soi de créatifs qui naviguent entre Paris, Bordeaux et Lyon, qui passent quelques jours en Dordogne pour s’imprégner du lieu, faire quelques photos et puis retournent en ville pour nous parler de cette campagne, qui n’existe pas, qui n’existe plus, cette campagne où on parlerait occitan à tout coin de rue, où tout le monde est beau, gentil, bienveillant, figé dans une image d’Epinal qui n’en finit pas de confirmer que le jeu vidéo est le medium échappatoire par excellence.
N Step Steve : part 1 (Ethan Clark, 2020)
Islands Of Insight (Lunarch Studios, Behavior Interactive, 2024)
Telephone Quest (Collectif, 2024)
Solar Ash (Hear Machine, Annapurna Interactive, 2021)
Lorelei and the Laser Eyes (Simogo, Annapurna Interactive, 2024): le jeu de l’année, avec Hellblade II et Immortality. J’écrirai dessus.
Looper (FeatureKreep, 2022)
Tunche (Leap Game Studios, HyperTrain Digital, 2021)
Citizen Sleeper (Jump Over the Edge, Fellow Traveler, 2022): c’est un jeu qui me frustre, parce que j’ai le sentiment étrange d’y avoir trop bien joué, et ça me donne l’impression d’être passé à côté de ce que tout le monde semble voir dedans. Si le début était difficile, j’ai vite eu une routine qui m’a permis non seulement d’explorer toutes les pistes sans trop faire de sacrifices, mais carrément aussi de devenir riche, un comble. Tellement riche que je pouvais passer plusieurs cycles à capitaliser dessus et simplement continuer d’accumuler en attendant que les cycles imposés pour faire avancer les trames narratives défilent tranquillement. Il en ressort que Citizen Sleeper est pour moi mécaniquement incompatible avec le propos qui se dégage, ou qui essaie de se dégager autour de la gig economy, de devoir faire des choix entre survivre au quotidien et essayer de poursuivre des choses plus sur le moyen-long terme. Passée la moitié du jeu et la fin d’une histoire potentiellement dangereuse, je n’avais plus aucun danger à l’horizon. Aucun problème d’argent, ou de médicaments. Je pense qu’un jeu pareil ne devrait pas me permettre d’arriver à cette situation. Cart Life est bien plus intéressant à ce niveau-là, à défaut d’être satisfaisant. De ma richesse a découlé le fait que j’ai pu explorer toutes les options, toutes les histoires, et les fins sont à peu près similaires, ce qui m’a un peu déçu. Narrativement il y a beaucoup d’offramps feelgood, pas tant de violence que ça, pas de sexe, et des relations gardées à une distance de bras de nous, sauf très rares exceptions. Ce n’est pour dire qu’il aurait fallu que le jeu soit plus violent, ou plus explicite dans son contenu, mais sa radicalité dans les concepts théoriques abordés (transhumanisme, société autonome, mégacorporations) brillait par l’absence de radicalité dans les comportements exposés par les personnages, pour qui la plus grande marque d’affection est un hug à l’américaine bien timide.
Humanity (tha Limited, Enhance, 2023)
Botany Manor (Balloon Studios, Whitethorn Games, 2024)
Superliminal (Pillow Castle Games, 2019): C’était pas super, limite nul. C’est le genre de production qui me fait me dire “vivement qu’on crève”, je veux dire, le genre humain. Dépenser des centaines d’heures et de ressources pour ça, appauvrir l’écosystème pour ça, c’est presque criminel.
Slash/Jump (Brynkilius, 2024)
Plague Tale : Requiem (Asobo Studio, Focus Entertainment, 2022): Ecriture abyssale. Caractérisation des personnages désastreuse. Très beaux panoramas et décors, quand ce n’est pas arénifié pour les besoins des phases d’affrontement. La sensation de voir une construction par tableau excel, tant dans les moments clés, que dans les sentiments recherchés à travers les mouvements musicaux, que dans les objectifs à faire.
Temple of Snek (Aetheric Games, Pixelkam, 2023): un jeu de puzzle très original, quoique un peu frustrant dans l’exécution. Je n’y ai pas joué, j’ai juste regardé Oriane le faire, et ce que j’ai vu m’a plu.
Scorn (Ebb Software, Kepler Interactive, 2022): le monde dépeint est fascinant, et les gestes à effectuer pour faire fonctionner ces étranges machines renforcent le sentiment d’aliénation qui ne nous quitte jamais vraiment. J’aurais bien voulu y jouer une ou deux heures de plus, la fin est arrivée un peu vite.
Cygni : All Guns Blazings ( KeelWorks, 2024): du grand spectacle de shmup, qui a fait son boulot le temps de deux soirées en coop avec Oriane.
Cat Quest (The Gentlebros, Pqube, 2017)
Spec Ops : The Line (Yager Development, 2K, 2012): la première rencontre avec des forces ennemies s’est déroulée de la façon suivante: je les ai tenus en joue, mais je n’ai pas tiré. J’attendais de voir si le jeu allait nous obliger à tirer, si il n’y avait pas une porte de sortie, un propos qui démarre immédiatement en remettant en question ça, pas dans six heures, pas dans deux heures, ici et maintenant, à la première rencontre. Les ennemis nous ont tiré dessus, sans sommation. À partir de là, je n’avais que deux choix: soit quitter le jeu pour ne pas avoir à les tuer, et conclure que non, Spec Ops ne dit rien sur la guerre, sur les conditionnements de joueurs, en tout cas pas avant plusieurs heures de jeu, un peu à la façon de ces spots publicitaires qui vous rappellent que manger gras, sucré, salé est nocif pour la santé, après 40 ans de lobbyisme intense et de cadeaux faits aux industriels de l’agro-alimentaire qui sont passées derrière; soit quitter le jeu donc, ou continuer, tirer alors que je ne voulais pas tirer, et voir où on allait. Et une heure trente plus tard, on allait toujours nulle part. Les ennemis continuaient d’arriver par dizaines, et je ne voulais toujours pas tirer, et il fallait pourtant que je les élimine, pour arriver au moment où cette fois-ci, je te le dis, le jeu va commencer à te faire réfléchir sur ce que tu es en train de faire, mais ducon je ne voulais pas tirer dès le début, et je ne réfléchis à rien si je réfléchis quand on me dit qu’il faudra réfléchir, pas avant, pas après, ce sera exactement pendant la scène que les développeurs ont concocté, avec un petit sourire de ceux qui savent qu’ils s’apprêtent à nous retourner le cerveau en faisant tomber sur le coin de la tronche cette réflexion légendaire sur les jeux de guerre et les FPS, comme si on avait décidé qu’on aimait ça, alors que je ne voulais pas tirer depuis le début, tout ce que tu as fait c’est me faire jouer ton jeu de con avec des règles que depuis le début je n’accepte pas mais comme tu as une réputation, j’ai continué, et j’ai continué, mais une heure trente après rien, absolument rien ne différenciait Spec Ops: The Line de n’importe quel autre jeu de tir. Et en disant ça, en voyant comment les gens en parlent en ligne, j’ai l’impression d’halluciner, que je n’aurais pas dû jouer cette heure trente de tir aux pigeons, que j’aurais dû, comme tout le monde apparemment, sauter directement au chapitre 6, ou 8, et voir le propos, le vrai propos du jeu, comme si les heures passées avant à courber l’échine n’existaient pas, comme si je n’avais pas déjà dit cent fois au jeu depuis le début, avant chaque affrontement, que je n’ai jamais voulu tirer, et que le jeu s’en fichait éperduement, parce que le message, le message, il arrivera quand nous, les développeurs, voudront qu’il arrive, pas avant, pas après, et certainement pas de ton propre chef.
Cat Quest II (The Gentlebros, Pqube, 2019)
Donut County (Ben Esposito, 2018)
Immortality (Half Mermaid, 2022): hypnotique, théâtral, un pur bijou, un film qui ne pouvait être qu’un jeu, un jeu qui ne pouvait pas mieux exploiter le medium. J’écrirai dessus.
Kunitsu-Gami : Path of the Goddess (Capcom, 2024): Je ne sais pas d’où sort le projet, quelqu’un chez Capcom avait envie de faire autre chose que des suites de franchise, quelque chose qui se penche un peu plus sur du réel, même à travers l’irréel du folklore yokai. Et c’est entre ces deux mondes que Kunitsu-Gami trace sa route, à la pointe de l’épée de Soh, sous les pieds dansants de la prêtresse et des petites gens qui l’accompagnent. C’est dans la façon de présenter ces tableaux comme des miniatures, du théâtre bunraku, comme pour dire voici un village reculé dans la montagne, regardez le quotidien, regardez ces hommes et ces femmes qui ont peur, mais qui ont surtout le courage d’affronter l’inconnu, parce qu’elles ont la foi, parce que la danse et le chant illuminent les journées, et parce qu’entre deux festivals, la vie est simple, loin des bilans financiers et des objectifs de vente; c’est dans l’abondance de fenêtres ouvertes sur les desserts, les histoires oubliées, les rumeurs de vallées, les traditions, les costumes qui ont tous une origine; c’est dans le mélange improbable entre exploration des lieux d’un côté, et mise en place d’une stratégie de l’autre, toujours à hauteur des villageois·es; c’est dans les gestes, minutieux, attentifs, des gens qui viennent en aide à la prêtresse, de Soh qui caresse les animaux du village, de la prêtresse elle-même qui mange un mochi de printemps, c’est tout ça qui fait de Kunitsu-Gami une oeuvre flottante et en même temps très ancrée dans l’histoire et dans la matérialité, presque anachronique, un jeu qui se soucie plus du petit peuple que de vouloir raconter une histoire épique de zombies résidents ou de démons qui pleurent, un dialogue constant entre le fantastique et l’ordinaire, une danse qui nous entraîne dans sa ferveur et nous laisse confuse. Comment Capcom a-t-il réussi à faire aboutir ce projet ? Quoi qu’il en soit, j’applaudis et si le studio rejoue de cette musique à l’avenir, je danserai volontiers dessus à nouveau.
Arranger : A Role Puzzling Adventure (Furniture & Mattress, 2024)
Inscryption (Daniel Mullins Games, 2021): une première partie intrigante, et puis c’est la catastrophe, la dégringolade. Il y a des parallèles à faire sur comment noita ou même who’s lila implémente mieux le délire de jeu qui déborde du jeu qu’inscryption, qui pour le coup est vraiment dans la veine de void stranger, un jeu de trou de lapin mais y a aucun lapin, c’est juste un trou pour le plaisir de tomber dans un trou, creusé par des gens qui dataminent et qui pensent que connaître les secrets et être dans le coup c’est la même chose que se perdre et se surprendre dans le miroir à se voir faire ces trucs improbables et l’image que ça renvoie et du jeu et de nous. inscryption ne renvoie rien si ce n’est l’image du dev qui te smirk à la gueule de son petit tour de manège, c’est faussement intelligent et superficiellement subversif, le méta est un contenu comme un autre, ça ne prend pas pour moi.
RYB (Fleb, 2016)
Beaucoup de jeux de chats cachés qui ne valent pas la peine d’être listés individuellement
Livres
Sexe et Mensonges : la vie sexuelle au Maroc (Leila Slimani, 2017): des témoignages qui font froid dans le dos.
Ceux qui restent (Benoit Coquard, 2022): un livre à mettre directement en porte-à-faux avec Dordogne, par exemple, à tout hasard. Un livre où une petite fille de huit ans ne revient pas à la campagne, qu’est-ce qu’elle ferait ici, là où il n’y a plus rien, là où les services publics ont été arrachés au territoire ? Un livre où les gens qui restent pensent que c’est aberrant de partir pour revenir, pourquoi faire ça ? Un livre où on s’intéresse aux personnes plutôt qu’à la carte postale de la campagne, et ça fait du bien.
Stèles : La grande famine en chine, 1958-1961 (Yang Jisheng): je l’avais commencé en 2023, et je l’ai fini cette année. Mon commentaire de l’année dernière ne change pas. Un gros pavé.
Pulsion lumière (Patrick Bouvet, 2012): un peu moins l’amour au premier regard avec celui-là, même si le style reste toujours du petit lait que je bois avec plaisir. Mais le fil rouge était un peu plus distendu, les images m’ont moins parlé.
Tu m’avais dit Ouessant (Gwenaëlle Abolivier, 2019)
Se défendre : une philosophie de la violence (Elsa Dorlin, 2017): le propos est intéressant, mais les sujets choisis lorgnent un peu trop vers l’Amérique. Ce n’est pas un hasard, c’est une universitaire qui passe son temps entre les Etats-Unis et la France, appliquant des concepts et des grilles de lecture théoriques de l’un à l’autre, ce qui se voit un peu à la lecture.
De notre monde emporté (Christian Astolfi, 2022): saisissant.
Transfuges de sexe (Emmanuel Beaubatie, 2021)
Le vieil homme et la guerre (John Scalzi, 2005): j’ai abandonné au bout de cent pages.
Où va l’argent des pauvres ? (Denis Colombi, 2021): pas aussi rigoureux que Repenser la pauvreté de Banerjee et Duflo, notamment parce que les chiffres manquent cruellement. On est plus dans la déconstruction de clichés, alors certes c’est intéressant, mais avec des sources c’est toujours mieux…
Nous (Evgueni Zamiatine, 1920): une excellente traduction, pour une histoire un peu fiévreuse.
Tout peut changer : Capitalisme et changement climatique (Naomi Klein, 2014): j’ai redonné une chance à Naomi Klein, mais non décidément, sa mollesse politique libérale ne me convainc pas.
Sigma (Julia Deck, 2017): moins emballé par Sigma que par Propriété Privée.
L’âge de discrétion in La Femme Rompue (Simone de Beauvoir, 1967)
Et toujours les forêts (Sandrine Collette, 2020): une écriture épurée qui semble imiter la nature dévastée du roman, comme pour reprendre le flambeau de Camus et des autres qui se demandaient si ça valait encore le coup d’écrire après les bombardements d’Hiroshima et Nagasaki. Ce ferait un bon film dans les mains de quelqu’un qui sait faire flotter les silences et les longs plan-séquences.
Taormine (Yves Ravey, 2022): tout ce que j’ai retenu de ce livre, et qui a rejoint désormais les phrases qu’on se dit de temps en temps en références partagées avec Oriane, c’est cette phrase qui ne vient pas du livre, mais d’une revue du livre sur Babelio de quelqu’un qui a le pseudo Litteraflure et qui écrit justement à propos de Taormine: “Lire du Ravey c’est contempler une oeuvre d’art contemporain, en rester perplexe et s’entendre dire derrière son dos : « il n’est pas donné à tout le monde de l’apprécier, Madame »“.
Lungomare (Sébastien Berlendis, 2024): c’est la même arnaque que Taormine, j’ai persisté dans le style, parce qu’à l’évidence c’est un style, ou tout du moins un genre littéraire, un espèce de roman de gare mais pour CSP+ en première classe, qui écoutent le Masque et la Plume, qui esquissent un petit “haha” en voyant une référence à une obscure station balnéaire italienne qu’ils ont visitée en 96 pour des vacances bien méritées, entre deux autres références à des chansons des années 70 et une petite phrase bien sentie sur le drame de ces couples qui se déchirent, qui regardent chaque année religieusement le nouvel Ozon, et c’est bien dommage que Woody Allen ne soit plus bien considéré de nos jours parce que quand même il avait des choses à dire sur notre société, et sur nous, mais que voulez-vous, les temps changent. Ce genre littéraire donc, très peu pour moi.
La condition anarchique (Frédéric Lordon, 2018): un livre offert par un ami, que je suis au regret de décevoir car je l’ai abandonné au bout de cent pages. Malheureusement, je suis bon client de Lordon, mais je ne le suis pas de Spinoza, et le voir faire une gymnastique périlleuse pour traduire des idées anarchiques en concepts spinoziens, non la sauce n’a pas pris.
Tous les Allemands n’ont pas un cœur de pierre (Marie Kahle, 2001): pris dans une boîte à livre en Provence, par hasard. Un récit autobiographique de quelqu’un qui a eu beaucoup de chance, grand bien lui fasse. À la lecture j’étais gêné un peu d’avoir l’impression que Marie Kahle semblait ne pas être au courant de ses privilèges dans sa fuite de l’Allemagne nazie, mais c’est difficile de lui en vouloir pour autant. Le sentiment était étrange.
La condition humaine (André Malraux, 1933): j’ai mis beaucoup de temps à le lire, mais j’en ressors satisfait. La lecture de Stèles auparavant m’a permis d’y voir clair dans les forces présentes dans le roman, et sans à dire que ça allégé la lecture, ça l’a bien recontextualisé, de sorte que j’ai pu avancer dans l’histoire sans chercher toutes les dix minutes les références historiques sur wikipédia. Le style de Malraux est à la fois vieux et en même temps très moderne, il y a un souci du détail dans la caractérisation des personnages, leurs manniérismes, parfaitement capturés par les mots et les formulations à leur encontre.
L’inconnue de la Seine (Guillaume Musso, 2021): pas bon, chef.
Médecin de campagne, une vie (Georges Vieilledent, 2014): une tranche de vie, prise au hasard dans la même boîte à livre que Tous les Allemands….
Burnout (Mehdi Meklat, Badroudine Saïd Abdallah, 2015): exercice singulier mais à quatre mains, une reconstitution pour essayer de comprendre ce qui a pu poussé un homme à s’immoler par le feu devant une agence Pôle Emploi. Le fait divers est réel, la reconstitution ne l’est pas moins, certaines phrases sonnaient juste, de ce que j’ai pu croiser au PIMMS, ou vécu moi-même face à cette institution.
Bandes dessinées
Leviathan #1 à #3 (Shiro Kuroi, 2021): un Battle Royale dans un vaisseau spatial. J’ai déjà oublié les trois-quarts du manga.
BRZKR #1 à #3 (Reeves, Kindt, Garney, 2021): Quand Keanu Reeves n’est pas occupé à jouer Keanu Reeves dans Cyberpunk, ou John Wick, il écrit une BD avec Keanu Reeves en personnage principal. Rien de bien palpitant.
Hunter X Hunter #36 et #37 (Yoshihiro Togashi, 2019)
Vinland Saga #18 à #27 (Makoto Yukimura, 2016): je m’étais arrêté un peu après l’ellipse temporelle, et j’avais envie de reprendre. L’arc en cours me frustre parce que les ficelles sont trop grosses, et surtout le propos politique me dérange. Faute d’imaginer autre chose, l’auteur force la main du scénario pour arriver où il veut arriver, et je n’aime pas ça. Je continue néanmoins parce que je veux voir où ça mène.
Anaïs Nin – Sur la mer des mensonges (Léonie Bischoff, 2020): malgré le dessin par moments superbe, je ne peux pas dire du bien de cette BD, ni de la femme dont elle est librement inspirée. D’abord, et c’est le point le plus gênant, la BD ne prend aucun recul sur certains éléments biographiques d’Anaïs Nin, et s’en tient à dérouler les évènements, voire à les sublimer avec un dessin magnifique, ce qui est pour le moins très troublant. On parle d’une femme qui, si elle a été pionnière dans beaucoup d’aspects, a aussi versé à fond dans la psychanalyse et a eu une relation incestueuse avec son père, qui est dessiné à un moment avec un soleil à la place de la tête. Ce passage n’est ni dénoncé, ni annoté ni recontextualisé. Je n’imagine pas une victime d’inceste tomber sur cet épisode qui est dépeint comme quelque chose de positif, d’inspirant même, en tout cas à aucun moment c’est présenté comme autre chose que ça. Ensuite, et ça en dit plus sur moi que sur la BD, c’est l’étalage d’une belle vie de bourgeoise oisive qui est portée aux nues, une de plus, et la BD n’y est pour rien, elle a vécu comme elle a vécu, mais quitte à lire des BDs sur des femmes, peut-être pourrait-on avoir d’autres modèles ?
Rebis (Irene Marchesini, Carlotta Dicataldo, 2024)
Dr Stone #1 à #26 (Riichiro Inagaki, Boichi, 2017-2022): un manga qui n’a rien à envier aux technobarons les plus véhéments de la Silicon Valley. Le message sous-jacent, martelé à de nombreuses reprises, promeut les sciences et les technologies comme seules échappatoires au chaos et à la bestialité inhérente à l’espèce humaine, et yadda yadda.
Fire Force #1 et #2 (Atsuhi Ohkubo, 2016): ce sera un abandon je pense, bientôt
The Wicked + The Divine #1 à #9 (Gillen, McKelvie, 2014-2019)
Blame ! #1 (Tsutomu Nihei, 1997): relu avec Oriane, qui découvrait. Ce qui me plaît le plus dans le début de Blame, c’est le silence, c’est l’absence de dialogues, les pages sont des tableaux qu’on parcourt, les mots surgissent en nous.
Indélébiles (Luz, 2018): des blagues très drôles, franchement. La BD dépeint une époque que j’aimerais croire révolue, où il suffit de traverser la rue et proposer ses planches ou ses travaux au rédac’ chef pour être publié peu après, mais je sais que dans certains cercles c’est toujours le cas. Comme disait Carlin “it’s a big group, and you ain’t in it”
Ailefroide, altitude 3954 (Jean-Marc Rochette, Olivier Bocquet, 2018): une tranche de vie à flanc de montagne, avec des dessins évocateurs et parfois vertigineux.
Thrashed (Derf Backderf, 2002): il y a une planche à mourir de rire. Pour le reste, c’est okay, ça se lit vite, le dessin n’est pas très beau, mais le sujet n’est pas non plus reluisant alors ça se marie bien. Ou se marine bien, vu qu’on parle de poubelles et de sacs qui fuient.
Albums
All Blues (Peter Frampton, 2019)
Dicey Dungeon : Reunion OST (Chipzel, 2022): morceau préféré: ”No Time To Dice”
Betrayal At Club Low (Cosmo D, 2022): morceau préféré: ”Outside The Club”
Where is Home / Hae ke Kae (Abel Selaocoe, 2022): morceau préféré: ”Ibuyile l’Africa / Africa Is Back”
Dionysus vs Tamada (Tamada, 2021): morceau préféré: ”Devna”
Biokinetics (Porter Ricks, 1996): des ambiances qui oscillent entre un club de fin du monde et une éclipse de trou noir. Morceau préféré: ”Port Gentil”
Error Repeat (Little Scale, 2009): du chiptune sans fioritures, punchy et énergique. Morceau préféré: ”Come Back To Me”
Supertales (Polylogue From Sila, 2024) honnêtement je ne me rappelle plus d’un seul morceau de cet album.
La Ñapa (The Bongo Hop, 2022): pareil pour celui-là. Tout ce que je sais c’est que ces deux groupes incluent une chanteuse qu’on va voir en février avec Oriane, et j’ai voulu voir ce qu’elle faisait. Ce sera un concert solo par contre, plus intimiste.
Ultrachroma (Kangding Ray, 2022): morceau préféré: ”Mauve Deepens”
Birth of the New Model (Perturbator, 2017): que dire de plus à ce stade, je l’écoute au moins une fois chaque année, mettez juste le casque, noyez-vous dans le noir et naissez à nouveau. Morceau préféré: ”Birth of the New Model”
Resort (Skee Mask, 2024): morceau préféré: ”Element”
Nothing (Louis Cole, 2024): j’aime tout ce que fait Louis Cole, mais là c’est un flop complet, désolé. C’est le résultat de quelqu’un qui a eu l’occasion et l’opportunité de jouer avec un orchestre philarmonique, et honnêtement je comprends, c’est de bonne guerre, profite frérot, fais toi ton petit plaisir, ça n’est pas tous les jours qu’on croise des occasions pareilles, j’aurais fait pareil à sa place, je ne l’aurais juste pas publié, mais j’imagine que c’est pour ça que je ne suis pas à sa place justement. Dans tous les cas, c’était imbuvable. Allez écouter le reste de ce qu’il fait avec KNOWER ou en solo, par exemple ”F it up” ou ”I’m Tight” ou ”Overtime”
Black Focus (Yussef Kamaal, 2016): du jazz, du funk, de l’electro, pour un cocktail détonnant. Morceau préféré: ”Lowrider”
Séries
The Bear s1 (Christopher Storer, 2022): abandonné au bout de quelques épisodes. Je suis fatigué de toujours avoir les mêmes histoires, toujours les mêmes conflits et dramas, juste avec un enrobage différent, ce soft power américain permanent, une autre ville des Etats-Unis, mais toujours les mêmes bâtiments, les mêmes façons d’écrire et de voir le monde. Si ce n’est pas Chicago, c’est Dallas, et si ce n’est pas Dallas, c’est la Silicon Valley, ou peut-être Washington. Assez, assez, assez.
Digimon Tamers (Toei Animation, 2001): un rythme pour le moins très lent, ce qui n’a pas aidé à rester motivées, et on a fini par lentement mais sûrement arrêté de regarder. On reprendra, peut-être.
Avatar : The Last Airbender s1 (Albert Kim, 2024): l’adaptation Netflix ressemble à un montage accéléré, ce qui fait qu’il n’y a plus rien de ce qui faisait le charme d’Avatar, à savoir le développement dans le temps des relations.
The Good Fight s5 et s6 (King & King, Robinson, 2021)
The Curse s1 (Nathan Fielder, Benny Safdie, 2023): pareil que pour The Bear.
Inside Number 9 s9 (Steve Pemberton, Reece Shearsmith, 2024): “Mulberry Close” était sans doute mon épisode préféré, talonné de prés par la conclusion “Plodding On” qui était exactement celle qu’il fallait pour ce projet.
Arcane s1 et s2 (Christian Linke, Alex Yee, Fortiche, 2019-2024): j’ai revu la première saison avec Oriane, qui ne l’avait jamais vue, en préparation de la seconde, que j’ai vu avec Claire après. Autant l’animation est superbe, et quelques idées de mise en scène parviennent à communiquer, quoique trop rapidement, les idées et les thèmes — je pense à l’effacement progressif de Viktor dans la saison 1, la rivalité entre Ekko et Jinx/Powder, magnifiquement réinterprétée dans la saison 2 au détour d’un épisode clé de voûte — autant l’écriture peine à pleinement exprimer quelque chose, car tout va trop vite, et les personnages sont d’abord et surtout des trajectoires sur des tableaux blancs. On sait où on va, on connaît déjà la destination, il s’agit juste de relier les points et amener tout ça à bon port, si possible en distribuant à peu près équitablement les différents moments pour que chaque faction, chaque fandom, chaque headcanon y trouve son compte. Et puis il y a cette saison 2, qui est incapable d’aller jusqu’au bout de la tension de la saison 1, parce que c’est Riot, parce que le divertissement n’est que ça, du divertissement, parce que c’est comme Joker: Folie à Deux, et que la révolution c’est toujours sympa en tant que concept, ça fait de belles images et des points de vertu, mais qu’on ne s’imagine pas un jour aller plus loin que ça, oh non. La saison 2 trahit complètement le soulèvement de Zaun contre Piltover. Quoi, vous voulez dire qu’on peut tuer des CEOs comme ça en pleine rue, qu’ils ont des adresses, une tête et une vulnérabilité aux balles comme tout un chacun ? Impensable ! Pour sortir de ce sac de noeuds libéral, on fait un pas de côté, on retombe dans des tropes de tierce faction qui s’immisce dans l’histoire, prétexte pour que les deux forces s’unissent et noient la révolution dans l’huile. C’est donc l’Arcane, un ennemi aux proportions cosmiques, parfaitement apolitique, une histoire d’harmonie et de rationalité froide contre lequel tout le monde est d’accord, prolos comme bourgeois. C’est un Warwick/Vander qui finit par ressurgir, pour réconcilier Vi et Jinx. Et c’est Noxus aussi, en cas de doute ou de grogne trop féroce du bas peuple, on ressort l’épouvantail des fachos, Piltover passe pour moins cruel en comparaison, et va même collaborer avec Zaun pour repousser l’ennemi, si c’est pas beau ça…Dormez tranquille, citoyen·ne, le status quo est sauf.